Au Moyen Âge, seuls les lettrés transmettent aux clercs et aux laïcs une vision globale du monde connu, inspirée de la philosophie antique et des textes bibliques. La créature fabuleuse est l'œuvre de Dieu, au même titre que les autres.
Cependant,elle est inférieure à l’homme car elle n’a pas de raison ; seuls ses instincts la guident. Elle est même au-delà de toute catégorie connue, car on ignore sa nature véritable qui est inventée de toutes pièces. Elle va servir néanmoins, comme les autres animaux, d’images nécessaires au dévoilement du mystère de Dieu. Elle devient un des symboles de reconnaissance de la vérité des Évangiles et de la Bible. Car elle est dans le texte sacré. Il n’est donc pas question de remettre
en cause son existence. Elle est un miroir des aspects les plus souterrains du monde. Sa fonction
est de mettre à nu les secrètes modalités de l’être pour aider l’homme à progresser vers une
humanité pleine et entière.
Le christianisme a peu inventé de créatures étranges. Il en hérite, le plus souvent, des cultures
grecques, égyptiennes, sumériennes. Il a su les récupérer pour une grande leçon biblique ou un
enseignement moral. Accepter l’existence d’un monstre exige cependant une conscience capable
de se détacher du visible (on ne rencontre pas tous les jours une serre, une licorne ou un dragon
au coin d’un bois, même s’il est fréquent d’apercevoir des sirènes, en mer…) et d’accepter
sans partage la parole de Dieu et les lois qui en découlent. Les clercs voient dans les animaux
fabuleux une collection de portraits mouvants. Au cours des siècles, ces animaux changent
souvent de formes et de symboles avant de se fixer définitivement dans une image ou une
interprétation.
Cependant, certains animaux fabuleux semblent avoir une histoire car on trouve leur
représentation partout sur la terre. C’est le cas de la licorne et du dragon, qui ont enchanté
la pensée du Moyen Âge et la nôtre, peut-être, encore…